société

Manterrupting : quand les hommes coupent la parole aux femmes

Couper la parole à une femme en pleine réunion : une mauvaise habitude qui cache de plus grands maux.


3 min

Les hommes interrompent 23% de fois plus une collègue féminine qu’un collègue masculin. Ça, c’est ce qu’on appelle le manterrupting. C’est la contraction du mot “man” et “interrupting”. Et c’est tout simplement le fait d’être coupée par un homme quand on est une femme.

Mais pour bien comprendre, il faut revenir un tout petit en arrière. Ce terme a été inventé par une autrice du Time, Jessica Bennett en 2015. Elle prend comme exemple une scène de 2009 lors de la cérémonie des MTV Video Music Awards entre Kanye West et Taylor Swift.

Alors que la chanteuse reçoit le trophée pour le meilleur clip féminin, Kanye l’interrompt en lui prenant le micro : "Yo, Taylor, je suis très heureux pour toi et je vais te laisser terminer, mais Beyoncé avait l'une des meilleures vidéos de tous les temps.” Taylor Swift vient de se faire manterrupter.

Un biais conscient ou inconscient ? Peu importe.

Bien que généralement inconscient, la manterrupting est un biais sexiste. Autrement dit : une mauvaise habitude dont il faut se défaire. On le voit beaucoup en politique… mais aussi en entreprise. Une étude de 2014 relayée par Néon explique que les hommes interrompent deux fois plus les femmes qu’elles ne le font”. Au global, dans une réunion, les hommes monopolisent 75% du temps de parole.

Ce biais peut prendre deux formes : consciente ou inconsciente. Et dans les deux cas, ça en dit long sur notre société.

  • Quand il est conscient et volontaire, le manterrupting est tout simplement un acte de mépris, de condescendance et de machisme.
  • Quand il est inconscient et involontaire, il résulte plus d’un stéréotype de genre inhérent et installé. Tout aussi néfaste bien que diffus.

La recherche le prouve : dès leur plus jeune âge, les garçons sont éduqués à se battre pour leurs idées, à s’affirmer et à se confronter aux autres, tandis que les filles sont éduquées à être compréhensives, à l’écoute. À l’école par exemple, il s’avère que les garçons prennent plus facilement la parole, y compris sans autorisation et cherchent à occuper « l’espace sonore », explique le site YouMatter.

Impolitesse ou prise de pouvoir ?

Poser la question, c’est déjà y répondre. “Une femme qui parle est bavarde, un homme qui parle est un leader”, déplore une cadre du CAC 40 dans les colonnes du Monde. Aussi bien en politique qu’en entreprise, les lieux de pouvoir, et donc la parole, sont monopolisés par les hommes. Et c’est loin d’être récent. Une première étude de 1975 décrit déjà le phénomène.

Souvent, le manterrupting peut dériver en mansplaining. Une façon de se réapproprier le discours d’une femme en le reformulant : ou l’art de vouloir avoir le dernier mot.

Alors comment on fait pour contrer ça ? Il ne faut pas attendre et le faire remarquer tout de suite. Voici 3 formulations pour reprendre le pouvoir sur une conversation :

  • ”Je n’avais pas terminé, donc je poursuis”,
  • ”Je vous laisserai la parole ensuite, mais laissez-moi terminer d’abord”,
  • ”J’ai bientôt terminé, vous pourrez réagir ensuite”.

Évidemment, inutile de vous dire qu’il faut le faire sans couper la parole. Ce serait dommage de womaninterrupter.

Yannick Merciris

Head of Editorial The Daily Swile

Journaliste qui aime autant les mots que le ballon rond. Vu que je gère mieux le premier que le second, j’ai décidé […]

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