À quoi ressembleront les bureaux du futur (proche) ?
Loin d’être enterrés, les bureaux connaissent actuellement un regain d’intérêt, notamment en France. Toujours plus séduisants, se pourrait-il qu’ils fassent la tête au carré au télétravail ? Comme on va le voir, le bureau du futur n’est pas dénué de paradoxes.
S’intéresser aux bureaux du futur, c’est déjà observer le comportement de celles et ceux qui nous en rapprochent le plus : la fameuse génération Z. Mais à quoi aspire-t-elle ? Contre toute attente, une étude réalisée par Parella, acteur de l’immobilier d’entreprise, démontre qu’il s’agit de la génération la plus attachée au travail en présentiel.
Et pour cause, près de la moitié d’entre eux craignent que la distance les prive des conseils de leur hiérarchie, ou engendre des difficultés pour travailler de manière productive avec leurs collègues, selon une étude réalisée par Poly et Censuswide à l’échelle européenne.
Ingrédient n°1 : De l’espace…
Pour qu’un représentant de la gén Z se sente comme un poisson dans l’eau au bureau, mieux vaut éviter de le faire tourner dans un bocal entièrement cloisonné. L’avenir semble appartenir aux entreprises qui nous feront plonger dans le grand bain, bien qu’une étude réalisée par Yemanja et le cabinet Comme on travaille révèle que de nombreuses entreprises françaises n’ont pas encore switché et disposent de bureaux fermés.
“De notre côté, nos clients qui appartiennent plutôt à l’univers des startups et scaleups plébiscitent les espaces ouverts, et l’espace en général. Auparavant, on maximisait le nombre de postes pour faire diminuer le prix au m2, soit environ un poste pour 6 ou 8 m2. Actuellement, nous sommes plutôt autour de 10 à 12 m2”, explique Kim Le, CMO de Deskeo, opérateur de bureaux flexibles et spécialiste de l’aménagement.
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Ingrédient n°2 : … et de l’intimité
Pour Camille Rabineau, spécialiste de la conception de bureaux et fondatrice de Comme on travaille, il est clair que l’open space façon poulailler est définitivement enterré. “La tendance est de travailler dans des espaces ouverts mais en petits îlots de 2 à 4 personnes maximum. On n’hésite pas non plus à séparer les espaces avec des plantes, des bibliothèques, des claustras, pour plus d'intimité, tout en restant dans des espaces ouverts”, explique-t-elle.
Ingrédient n°3 : Du flex pas si flex
Avec la crise écologique, aucune entreprise ne pourra se permettre d’avoir des bureaux vides. Le flex office - où aucun bureau n’est attitré - répond en partie à cet enjeu en optimisant l’utilisation des espaces. Toutefois, à l’heure actuelle, Camille Rabineau minimise la déferlante du flex office.
En effet, près de 40% des entreprises qu’elle a étudiées ont renoncé à le mettre en place. “Et puis, on peut observer que même en flex office, on va avoir tendance à se rasseoir à la même place. Cela fait écho aux travaux de Daniel Kahneman qui explique que 80% de nos décisions sont basées sur nos réflexes car c’est une forme de routine rassurante. Je pense donc qu’il est important de pouvoir laisser aux salariés une marge de manœuvre pour qu’ils demeurent maîtres de leur royaume”, analyse la spécialiste. Cela peut passer aussi par la réservation en amont du poste de travail désiré.
Ingrédient n°4 : Des ambiances variées
Mais aimer travailler au même endroit n’empêche pas la liberté de mouvement pour s’isoler dans une phone box ou au contraire rechercher l’émulation collective dans un lieu plus aéré. Pour Kim Le, “il est important d’avoir des espaces de travail calmes et des lieux plus passants et dynamiques”. À noter que cette hybridation du travail se ressent jusqu’au mobilier de bureau. “Pour transformer un espace de travail en salle de réunion, on peut avoir des bureaux pliants par exemple ou encore des cloisons amovibles. C’est quelque chose qui s’est beaucoup développé avec l’hybridation du travail”, poursuit la CMO de Deskeo.
Ingrédient n°5 : À fond sur la convivialité
Depuis la pandémie, les espaces dédiés à la convivialité ont augmenté de plus de 30% dans les entreprises, c’est même 50% pour les tisaneries ou les coins café, qu’il s’agisse de petites ou grandes sociétés. “Ce sont des espaces informels qui assurent la créativité et la productivité des équipes en améliorant la communication et notamment le feedback”, pointe Kim Le. Sans oublier que c’est surtout le besoin de lien social qui motive les salariés à revenir au bureau.
Ingrédient n°6 : Aussi confortable qu’à l’hôtel
Et pour donner encore plus envie aux salariés de s'asseoir à leur chaise de bureau, les entreprises doivent hausser le niveau de leurs prestations. “Les acteurs de l’immobilier de bureau s’inspirent de plus en plus des codes du coworking et de l'hôtellerie pour proposer une expérience servicielle incomparable aux salariés”, pointe Camille Rabineau.
C’est effectivement le point de vue de Deskeo qui mise sur le réemploi des codes de l’hôtellerie pour offrir des prestations très haut-de-gamme aux entreprises. Cela explique l’apparition de jobs comme le Facility manager qui va par exemple organiser une dégustation de chocolats, mettre sur pied une fête pour Halloween ou encore expliquer comment fonctionne la salle de gym.
Ingrédient n°7 : Des bureaux personnalisés
Le branding, ça vaut aussi pour les bureaux ! C’est la petite touche finale pour venir pimper les locaux. “Il est important que chaque entreprise ait des locaux à son image. Par exemple, chez Sorare, nous avons aménagé de nombreux espaces dédiés au sport, ce qui correspond à l’ADN de l’entreprise”, pointe Kim Le qui insiste sur l’importance de cet aspect pour cultiver le sentiment d’appartenance des salariés.
Et demain, tous en bureaux partagés ?
Décloisonner tout en cultivant l’intimité, hybrider les espaces, aménager toujours plus d’espaces de convivialité, créer des locaux à son image… voilà ce à quoi se destinent les bureaux. Et si les espaces ne peuvent pas tout, et surtout pas rattraper un management douteux, ils peuvent être la cerise sur le gâteau pour faire revenir les salariés au bureau.
Camille Rabineau conclut en ajoutant que le futur des bureaux se traduira aussi certainement par la multiplication des tiers lieux, sortes de bureaux partagés qui permettront à chacun de travailler plus près de chez soi. “Dans une perspective de crise écologique, on peut supposer que les déplacements domicile-travail vont être de plus en plus scrutés à la loupe, sans compter l’impact sur la vie pro et perso”, estime-t-elle. Alors que l’on annonce la mort du coworking avec la chute de l’empire WeWork, il y a fort à parier pour que ces espaces de travail partagés continuent malgré tout à fleurir sur le territoire, permettant de répondre à de multiples équations.