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RH : Comment utiliser la data pour passer plus de temps avec l’humain ?

Les RH doivent-ils passer leur temps sur Excel ou sur le terrain ? La réponse semble évidente. Et pourtant, manipuler les données fait partie de leur quotidien. Comment faire en sorte que la data se mette au service de l’humain ?


5 min
11 décembre 2023par Yannick Merciris

“Le taf des RH c’est que les gens se sentent bien et qu’ils progressent. Ils ont donc besoin d’aide à la prise de décision”. Et pour prendre une décision, quoi de mieux que de s’appuyer sur des faits, des chiffres ? C’est le constat fait par Léopold Adam, CEO et co-fondateur de Reflect, un outil de pilotage RH. “C’est comme un cockpit”, présente-t-il, “il y a plein d’outils qui existent et qui sont spécialisés sur une fonction : recrutement, paie, formation… Le problème, c’est que les boites jonglent avec plein d’outils. C’est difficile d’avoir une vue d’ensemble sur l’organisation. L’idée, c'est de rassembler toutes les données des employés sur une même plateforme pour aider à la prise de décision”.

Encore un outil en plus ?

Très bien, mais concrètement, à quoi ça sert ? N’est-ce pas uniquement un “outil en plus” ? “Ça permet de suivre des infos clés comme le turn-over. Qui part ? Pourquoi les gens partent ? Est-ce que ce sont des gens qui partent après une période d’essai ou après 5 ans d’ancienneté ?”. L’analyse et les prises de décisions derrière ne sont pas les mêmes. Il y a des tableaux de bord prédéfinis. C’est clé en main”, promet le fondateur.

“Je m’en sers au moins une à deux fois par semaine, mais en phase d’évaluation, c’est plusieurs fois par jour”, explique Nathalie Sauvage, VP People d’Homa Games, éditeur de jeux vidéo. Typiquement le nombre de personnes. C’est tout bête, mais avant, il fallait passer par un extract de données. Si tu veux savoir combien d’entrées ou de sorties tu as, c’est pareil. Aujourd’hui, tout est sur mon tableau”, se réjouit celle qui gère près de 230 collaborateurs dans plus de vingt pays.

Toutes ces datas rassemblées en un même endroit, est-ce forcément une bonne nouvelle ? En quoi cela peut-il réellement impacter une stratégie RH ? Pour Reflect “avoir des données, ça permet de rationaliser les intuitions, et donc de mieux guider la stratégie”. Il donne ainsi l’exemple de cette RH qui s’est rendue compte qu’elle a eu beaucoup plus de départs après la période d’essai. Elle a donc mieux formé les managers sur l’onboarding et l’accompagnement.

De son côté, Nathalie Sauvage confesse que tout ça “peut faire peur”, avant d’enchaîner : “mais moi, je suis très data driven, les chiffres ne me font pas peur. Je ne me sers pas de tout au quotidien, mais je sais que les données sont dispos et que je n’aurai pas besoin de passer du temps à les retraiter”. Le co-fondateur explique que “ça permet d’être plus efficace, plus entendu et donc avoir plus de pouvoir ou d’impact au sein de l’entreprise. Tu as des données qui rationalisent tes intuitions”. Et de raconter ce retour d’un utilisateur : Un jour ça a cloué le bec à mon CFO”, ça nous a fait marrer, même si le but c’est de ne pas créer de conflits entre les départements”.

Doit-on se méfier des chiffres ?

Les chiffres font gagner du temps, mais ne se suffisent pas à eux-même. “On fait très attention à donner des recommandations, car il peut y avoir de faux positifs”, prévient Léopold Adam.

Pour notre RH, il est important d’accompagner à la lecture de ces données brutes : “je partage certaines infos avec les managers, mais pas toutes. Car si on ne contextualise pas, on peut mal interpréter. Quelqu’un qui ne sait pas pourquoi un taux de turnover de 2% ce n'est pas forcément bien, il va tenter de le réduire le plus possible et donc parfois garder les mauvais”. Et de conclure : C’est un outil d’accompagnement, mais ce n’est pas une baguette magique”.

Des datas en plus, mais toujours beaucoup de respect des données personnelles. Ainsi, chez Reflect on refuse d’analyser de nombreuses datas : Un investisseur nous avait demandé si on pouvait compiler les datas chaudes : conversations, slack, Gmail, etc, dans le but d’analyser le nombre de connexions. Le point positif, c’est de voir si des gens sont perdus, ne parlent à personne, ou si des gens se connectent tard à leur boite mail. Ça, ce sont des cas d’usages plutôt cools pour la santé mentale des gens. Mais tu peux aussi avoir du flicage. Mais ça on ne le fait pas”. Aux Etats-Unis, par exemple, les données sont bien plus précises et intimes (pas de RGPD là-bas). Ils peuvent s’attaquer aux origines ethnoraciales, ou même à l’orientation sexuelle.

Du temps gagné… mais pour faire quoi derrière ?

C’est bien joli tout ça, mais combien de temps gagne-t-on réellement avec une vision plus claire de ses chiffres ? “Au moins 5h par mois, mais probablement plus”, estime Nathalie Sauvage. Pour Léopold Adam, le chiffre est ben plus important : “les RH sont constamment harcelés pour qu’ils donnent des datas. Sur la RSE, il faut des données. Les sales ont besoin de données pour un appel d’offre. Le board réclame aussi des infos sur le turnover. Ça fluidifie la communication et ça leur fait gagner plusieurs jours par mois. Mais surtout, ça légitime leur fonction”.

Selon le fondateur, l’outil permet de mettre en lumière la quintessence du métier RH. Et spoiler, ce n’est pas que de jouer avec les chiffres mais bel et bien de se concentrer “sur des tâches qui ont beaucoup plus de valeur ajoutée comme l’accompagnement des managers, la progression des salariés, la communication et pas passer du temps à faire des tableaux Excel”.

Un point de vue partagé par la première concernée, Nathalie, RH : “ça me permet de faire plus de choses, d’approfondir des sujets ou encore d’accompagner les salariés. C’est du temps réinvesti sur des tâches à plus grande valeur ajoutée. À partir du moment où un outil peut le faire pour toi, ton cerveau peut servir ailleurs”.

Yannick Merciris

Head of Editorial The Daily Swile

Journaliste qui aime autant les mots que le ballon rond. Vu que je gère mieux le premier que le second, j’ai décidé […]

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