Seniors et Gen Z : 5 pistes pour pratiquer le management intergénérationnel
Le management intergénérationnel, cela fait des années qu’on en parle. Mais dans les faits, peu d’entreprises se sont vraiment retroussées les manches sur ce sujet. Alors, au-delà de la simple cohabitation, comment faire coopérer efficacement les générations ?
Alors que les lettres de l’alphabet s’enchaînent (Gén X, Y, Z et bientôt alpha), l’intergénérationnel devient un sujet majeur pour les entreprises, notamment avec les diverses disruptions technologiques. “On ne peut pas faire l’impasse sur l’intergénérationnel. Par contre, il faut clairement mettre l’âge de côté. L’intergénérationnel est avant tout une question d’état d’esprit. On peut être jeune et avoir la mentalité d’un boomer, et être très agile du haut de ses soixante ans”, introduit Céline Thomas, Conférencière en Management reconnue.
Son message aux entreprises ? Considérer l’intergénérationnel comme l’un des piliers de la politique de diversité d’une entreprise, tout comme le genre, la présence d’un handicap, l’origine sociale, etc. Alors, quelles pistes mettre en œuvre ?
Sensibiliser les collaborateurs sur le sujet
Le management intergénérationnel n’est pas un terme nouveau. Fondateur d’un observatoire qui lui est dédié (l’OMIG), Marc Raynaud évangélise les entreprises sur ce sujet depuis plus de 10 ans. Et tout commence par une conférence/formation de sensibilisation sur le sujet. “Ce qui compte, ce n’est pas tant l’importance du gap générationnel, qu’il soit de 5 ou 50%, mais que cette différence soit reconnue”, affirme-t-il.
Un avis partagé par Elodie Gentina, Professeure à l’IESEG School of Management et conférencière sur la Génération Z. Lorsqu’elle mène une conférence en première instance, elle cherche avant tout à dresser le portrait de la jeune génération et à abattre un certain nombre de stéréotypes. “Cette prise de conscience a pour but de faire comprendre aux seniors le mode de fonctionnement des plus jeunes, d’inciter l’écoute mutuelle et de valoriser cette diversité au sein de l’entreprise”, affirme la spécialiste. Bref, il faut que les seniors se souviennent qu’ils ont été jeunes, et les jeunes qu’ils seront un jour… seniors !
Toutefois, s’arrêter à l’étape de la sensibilisation est loin d’être suffisant. Alors poursuivons notre exploration !
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Travailler en focus groupe sur les représentations
Pour aller plus loin, il peut être intéressant de former deux groupes de travail. Le premier avec la jeune génération, le second avec les seniors. “Un facilitateur va aider les deux parties à exprimer leur perception de l’autre génération, mais chacune de son côté”, illustre Marc Raynaud. Typiquement, les jeunes percevront (peut-être) les plus “vieux” comme lents, et les seniors verront en la Gen Z une joyeuse bande de feignants. Les stéréotypes quoi !
Ensuite, les deux groupes se rencontrent et peuvent échanger sur leurs représentations mutuelles, le but étant que chacun puisse dire s’il se reconnaît ou non dans la description, et puisse expliquer son propre ressenti. Une méthode qui requiert le respect de ces différentes étapes et surtout l’intervention d’un tiers neutre aguerri. N’allez pas tout de suite former des groupes mixtes sous peine que ça tourne au vinaigre !
Former des binômes junior/senior à la tête de projets
Pour permettre aux générations de vraiment collaborer ensemble, encore faut-il leur en donner l’opportunité. On peut imaginer la mise en place d’une chefferie de projet partagée entre un jeune et un moins jeune. Une pratique vue et revue en Scandinavie, mais qui peine à percer dans l’Hexagone selon Marc Raynaud.
Pour former ces binômes, il ne s’agit finalement pas de penser en termes d’âge, mais plutôt de complémentarité des compétences. “Je crois que s’il y avait un seul message à retenir, ce serait celui-ci”, insiste notre interlocuteur.
En axant sur ce point, on évite aux deux parties de se marcher sur les pieds et on favorise le transfert de compétences en permettant à chacun d’initier l’autre sur son propre domaine d’expertise. Typiquement, un jeune ultra-performant sur un logiciel et un senior aguerri à la commercialisation sur le marché américain pourront former un binôme redoutable.
Le mentoring et le coaching
Le mentoring n’est clairement pas une pratique innovante. Mais elle est très utilisée et peut-être efficace si, et seulement si, les deux parties ont envie de tenter l’expérience. C’est très vrai dans le cas du reverse mentoring où un senior peut avoir du mal à accepter qu’un plus jeune puisse lui apprendre quelque chose. “Il ne faut surtout pas forcer le mouvement, et miser sur des mentors qui font preuve de pédagogie”, conseille Marc Raynaud.
Pour redonner un coup de jeune au mentorat, on peut aussi imaginer des jeux de rôle où le jeune se met dans la peau du senior par exemple. “Une personne extérieure est postée en observateur et facilitera l’analyse ensuite”, recommande Elodie Gentina.
Autre solution : sortir de la posture de mentoring pour aller davantage vers du coaching. C’est exactement l’histoire de Jacques, 59 ans, qui a mis deux ans à retrouver un job et qui est aujourd’hui en position de coach. Cela fonctionne notamment très bien pour le processus d’intégration. On peut imaginer que le buddy/coach du jeune arrivant soit un senior de l’entreprise.
Le shadow comex
Dans des entreprises comme Accor ou KPMG, il existe des “shadow comex” composés de jeunes pousses qui planchent sur les mêmes questions que le “vrai” comex. Chez Nestlé, les jeunes sont notamment sollicités sur les questions de RSE : “ils sont reconnus pour leurs compétences plus avancées que les seniors sur ces sujets, tout comme les langues ou le digital. C’est ce que l’on appelle la socialisation inversée”, relève Elodie Gentina.
Il est d’autant plus important d’associer la Gen Z à la prise de décision que les jeunes n’acceptent pas qu’elle soit dictée par l’âge et non pas les compétences. “On note d’ailleurs qu’au sein même des foyers, les enfants sont de plus en plus prescripteurs auprès de leurs parents pour des choix de consommation comme la voiture, les restaurants, etc”, souligne la professeure. En mettant les plus jeunes en posture active, on les responsabilise et leur offre l’opportunité de réellement coopérer avec leurs aînés. La véritable clé de l‘intergénérationnel ?