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Seniors trop chers, fragiles, dépassés… Ces clichés sont-ils avérés ?

Clichés seniors ou réalité

Saviez-vous qu’en France, l’âge est la première cause de discrimination en entreprise ? Et pour cause : la liste des clichés sur les seniors est presque aussi longue que le nombre de bougies sur le gâteau des 50+. Alors, pour en finir une bonne fois pour toute avec ces stéréotypes, passons-les un à un au détecteur de mensonges.


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Cliché 1 : “Les seniors sont trop chers”

“Je ne peux pas embaucher un senior, car je ne peux pas me le permettre”. Cette phrase qui flaire (bon) la bonne excuse est l’argument n°1 opposé par les clients d’Amélie Favre-Guittet, Présidente et Cofondatrice du groupe Talent Management, lorsqu’elle leur propose des profils seniors lors d’un recrutement.

📍 Fact checking : Sur le papier, plus on avance dans sa carrière, mieux, on est payés puisque l’expérience - la vraie- ça a un coût. Sauf que, plusieurs études ont démontré le contraire. C’est ce qu’on appelle la “fin du mythe de la génération sacrifiée”. En embauchant un jeune par rapport à un senior, l’entreprise doit supporter des coûts liés à l’apprentissage et au turnover. Du coup, dans ce laps de temps, le senior est plus rentable.

Et puis, les seniors sont prêts à revoir leurs salaires à la baisse, par envie de s’engager dans un nouveau projet, et aussi, car leurs charges sont finalement beaucoup moins élevées. “J’ai l’exemple d’un DAF (Directeur Administratif et Financier, ndlr) de 55 ans qui avait fait une carrière dans un grand groupe payé plus de 150K-180K par an. Il était prêt à retomber à 60-70K pour rejoindre un projet enthousiasmant type startup et se faire plaisir pour la fin de sa carrière”, raconte-t-elle.

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Cliché 2 : “il/elle va être largué.e sur les nouvelles technologies”

“Je n’imagine pas Jean-Yves travailler sur Notion. Il va être largué sur nos outils collaboratifs”. Voilà encore une bonne raison de mettre les seniors au placard dans un monde où le travail s’est presque entièrement digitalisé et où l’utilisation de ces outils est un prérequis.

📍Fact checking :C’est quand même un comble de penser que les seniors ne sont pas capables de travailler avec les nouvelles technologies alors que c’est bien cette génération qui a connu le plus de transformations”, s’insurge Frédérique Jeske, Présidente de l’association Sénior for good et Dirigeante du Cabinet en conseil et formation USKOA.

Âgée de 57 ans, elle a démarré avec le minitel et figure aujourd’hui parmi les LinkedIn Top Voice. Et d'ajouter : “Si nous n’étions pas capables de travailler avec les nouveaux outils, cela ferait bien longtemps que l’on ne serait plus en poste”.

Un sondage LiveCareer démontre d’ailleurs que 89% des 41-56 ans (génération X), et 81% des 57-75 ans (baby-boomers) se disent à l’aise avec les nouvelles technologies au travail. De manière générale, “la rigidité et la non-acceptation du changement est plutôt une question de personnalité, que d’âge”, renchérit Amélie Favre-Guittet.

Cliché 3 : “Le senior a une santé plus fragile”

“Le senior a une moins bonne santé, il va être plus souvent absent”. Pour les entreprises, embaucher un senior peut être un sujet d’inquiétude autour des problématiques de santé. “L’absence et la maladie renvoient à l’image de la mort, c’est pourquoi les entreprises rechignent à recruter des seniors”, observe Amélie Favre Guittet.

📍 Fact checking : Dans les faits, il est vrai que les plus de 55 ans enregistrent un plus fort taux d’absentéisme selon les chiffres de l’Observatoire de l’absentéisme : 6,81% contre 3,21% pour les moins de 25 ans. Toutefois, on observe que le taux d’absentéisme des moins de 35 ans a augmenté de 11,6% entre 2019 et 2021, alors que celui des plus de 35 ans est resté stable (+0,6%).

Une étude de l'Organisation mondiale de la santé a montré que les travailleurs plus âgés ont tendance à avoir un taux d'absentéisme plus faible que les travailleurs plus jeunes. “Cela peut faire peur aux recruteurs mais une personne qui a eu un cancer par exemple va être très bien suivie par la suite. Sans compter que les seniors ont une compréhension plus forte des enjeux business de l’entreprise et ne s’arrêtent que si cela est vraiment nécessaire”, affirme Amélie Favre-Guittet.

Cliché n°4 : “Un senior, c’est dur à manager”

“Il/elle ne va jamais accepter d’être managé.e par un plus jeune”. Lorsque le senior postule pour un job où il doit être managé par un professionnel de l’âge de son propre enfant, les entreprises grincent des dents.

📍 Fact checking : Il est vrai qu’il peut être difficile pour certains seniors de passer leur entretien d’évaluation avec un gringalet de 28 ans.  Ceci étant dit, cela est le plus souvent lié à une question d’égo et de personnalité. Surtout, “il est essentiel de recentrer le recrutement sur les compétences et ne pas projeter une image sur le senior”, recommande Amélie Favre-Guittet.

Et puis, la situation n’a rien d’exceptionnel  : à l’heure actuelle, 15% des collaborateurs répondent à un supérieur d’au moins dix ans leur cadet.Ce qu’il faut comprendre, c’est que les seniors n’ont pas les dents qui rayent le parquet. Leur carrière est derrière eux, ils n’ont rien à prouver, ils ont surtout envie de transmettre”, relève Frederique Jeske. Et puis, parce qu’ils ont vécu bien des crises et des moments difficiles au travail, les seniors font preuve de stabilité émotionnelle. Un atout dans les équipes !

Cliché n°5 : “Un senior, c’est trop lent”

“J’ai besoin que mes employés soient ultra-productifs, je ne veux pas m’encombrer d’un senior trop lent”. Voilà un autre préjugé à la dent dure !

📍 Fact checking : Une étude réalisée par la Commission Européenne révèle que les 55-64 ans ont un taux de productivité supérieur de 9% à celui des plus jeunes. Un chiffre finalement très logique puisque l’expérience et l’expertise des seniors les aident à résoudre les problèmes plus rapidement.

Ils sont aussi capables d’anticiper les difficultés. Une étude de l'Université de Boston a révélé que les travailleurs âgés ont tendance à être plus indépendants et à avoir une meilleure capacité à travailler de manière autonome que les travailleurs plus jeunes. “Il faut vraiment réhabiliter l’expérience au sein des entreprises. Les seniors ont l’avantage d’avoir une vision hélicoptère et de prendre en main leurs fonctions très rapidement. Cette capacité d’adaptation/résilience est très précieuse et sous-estimée”, lance Frederique Jeske.

Cliché n°6 : “les seniors sont moins engagés”

“Passé 50 ans, les seniors ne font qu’attendre la retraite, ils ne sont plus engagés”. De plus, certaines entreprises n’ont pas envie de miser sur un senior parce qu’il ne lui reste que 10 ans de carrière. “Cela m’est arrivé : je cochais toutes les cases pour un poste et l’entreprise n’a même pas voulu me recevoir parce qu’il me restait une décennie à travailler”, raconte Frederique Jeske.

📍 Fact checking : Une étude réalisée par la Harvard Business Review démontre au contraire que les seniors sont les plus engagés dans l’entreprise. Quant à la question du nombre d’années restant au senior :“c’est absolument aberrant quand on sait que la durée de fidélité moyenne d’un jeune salarié en entreprise est de 2 ans”, souligne Frederique Jeske.

En effet, quel cadre peut garantir aujourd’hui qu’il va rester 10 ans dans la même boîte ? De plus, il existe différentes manières de contractualiser avec un senior autres que le CDI.

En résumé, chers recruteurs, délestez-vous du poids des préjugés pour favoriser la rencontre, la vraie ! Vous ne recrutez pas un âge, mais une personnalité et des compétences. Qu’il s’agisse de jeunisme ou d’agisme, nous devons tous surveiller nos biais cognitifs, à commencer par les biais de confirmation. “Par exemple, on va chercher chez un jeune de la créativité, et pas chez un senior. C’est dommage ! Nous devons apprendre à changer de regard sur les plus de 50 ans qui sont totalement invisibilisés dans la société”, conclut Frederique Jeske.

Paulina Jonquères d’Oriola

Journaliste

Journaliste et experte Future of work (ça claque non ?), je mitonne des articles pour la crème de la crème des médias […]

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