Syndrome de l’imposteur au travail : faut-il absolument s’en libérer ?
Qui ne s’est jamais senti illégitime au moins une fois dans sa carrière ? 70% de la population française souffrirait du syndrome de l’imposteur. Et parmi eux, des salariés et managers de tous horizons. De quoi s’inquiéter… ou bien l’utiliser comme un tremplin.
Du sentiment réprimé au phénomène généralisé
Le syndrome de l’imposteur a vu le jour dans les années 1970 avec les travaux de deux psychologues, Pauline Rose Clance et Suzanne Imes. Concrètement, il renvoie au sentiment d’illégitimité et d’incompétence qui se manifesterait aujourd’hui chez 7 Français sur 10.
Il se caractérise de deux manières, parfois conjointement selon les personnes :
- Surmenage, ou burn-out : le fait de surenchérir dans ses efforts et vouloir en faire toujours plus, plus vite, notamment pour combler un manque de confiance. Preuve que les candidats se disant ‘trop perfectionnistes’ en entretien disent parfois vrai…
- Procrastination : à l’inverse, pour d’autres, ce syndrome sera perçu comme une source de stress profonde, au point de remettre au lendemain les tâches à accomplir. Attention cependant à ne pas confondre la flemme passagère au syndrome de l’imposteur (on est tous passés par là).
Mais constat rassurant : autrefois jugé tabou, ce complexe est aujourd’hui rentré dans le langage courant. À tel point que tous les livres de développement personnel s’en emparent, à coups de conseils et de retours d’expérience : comment gagner confiance en soi, s’imposer, éviter la procrastination… autant de sujets voués à extirper les “imposteurs” de leur condition.
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- Le syndrome de l’imposteur toucherait les femmes plus sévèrement, bien que les hommes ne soient pas en reste : une étude sur les salariés et salariées de la Tech a montré que 50% des femmes seraient concernées, contre 39% de leurs homologues masculins.
- D’autre part, les managers seraient beaucoup plus touchés qu’on ne le pense ; 6 managers sur 10 selon une étude YouGov et Capital.
Quelles conséquences au travail ?
Le monde du travail et le syndrome de l’imposteur, c’est un peu comme tic et tac, cul et chemise, Mark & Spencer… Ça va de pair. Sans surprise, les répercussions y vont bon train selon la professeure Sarah Hudson :
- L’auto-censure : le syndrome de l’imposteur augmenterait les risques d'autocensure à plusieurs niveaux : créatif, stratégique, décisionnel…
- La fatigue psychologique : à cela s’ajoute une fatigue mentale pour faire “profil bas” et tenter de camoufler ces pensées parasites.
- Un frein pour le développement de carrière : enfin, au-delà du quotidien, ce sont les ambitions professionnelles qui peuvent être impactées. Évoluer dans son poste, changer d’entreprise… Des décisions naturelles pour certains, qui seront de véritables parcours du combattant pour les personnes atteintes.
Mais tout n’est pas à voir sous un mauvais œil : sans pour autant parler d’avantages, le complexe de l’imposteur aurait plus de vertus qu’on ne le pense.
Un complexe qui cacherait une force
L’un des principaux écueils reproché au syndrome de l’imposteur, c’est le fait d’être vulnérable. Mais qui dit vulnérabilité, dit empathie. Et oh, fruit du hasard, l’empathie serait la compétence n°1 recherchée chez les managers (entre autres) selon diverses recherches. 6 managers sur 10 considèrent d’ailleurs le syndrome de l’imposteur comme un atout (vs. 58% des Français en général).
Avoir un syndrome de l’imposteur n’est donc pas une fatalité et ne révèle pas uniquement des aspects négatifs. C’est en tout cas ce que démontre une étude de Basima A. Tewfik, maîtresse de conférences au MIT Sloan : les personnes ayant ce genre de pensées gèrent mieux les relations interpersonnelles, en voulant “compenser leur incompétence auto-perçue”.
Mais là encore, il faut nuancer : le désir de bien faire se confronte souvent au stress et au surmenage. Est-ce possible de ne garder que le positif ? Toujours selon Basima A. Tewfik, il faudrait trouver un juste équilibre entre « bienfaits et méfaits » de ce sentiment profond, au lieu de s’épuiser psychologiquement à tenter d’y mettre fin.