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Au fait, à partir de quel âge est-on un “senior” ?

Quand on parle de senior en entreprise, à quelle tranche d’âge se réfère-t-on ? Et bien la réponse risque fort de mettre une claque à tous les quarantenaires. D’ailleurs, n’est-il tout simplement pas temps de revoir l’appellation “senior”?


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C’est une question en apparence toute bête, mais la réponse est loin d’être tranchée : à partir de quand devient-on senior en entreprise ? Pas en matière d’expérience, mais en ce qui concerne la tranche d’âge. De l’aveu de Frederique Jeske, Présidente de l’association Senior for good, il existe un vrai flou artistique autour du sujet, preuve que la thématique n’est pas assez prise au sérieux alors que l’on vit actuellement une révolution démographique.

Il y a plus de “vieux” que de nouveaux nés !

Toutes les 37 secondes, un individu passe la barre des 50 ans alors qu’un bébé naît toutes les 48 secondes * ? Un phénomène inédit dans l’histoire de l’humanité (selon l’INSEE) : tandis que la proportion des plus de 60 ans augmente celle des moins de 20 ans diminue et même, depuis fin 2015, les plus de 60 ans sont plus nombreux que les moins de 20 ans.

En entreprise, en matière de gestion de carrière et de formation professionnelle, on devient senior à partir de l’âge de 45 ans. Hein, 45 ans ? Si vous êtes tombé comme nous de votre chaise, c’est normal. On est bien d’accord, c’est rudement jeune. D'ailleurs, ce passage à la séniorité, Frederique Jeske s’en souvient encore : “J’étais dans un grand groupe. Le jour de mes 45 ans, j’ai reçu un mail m’expliquant que j’étais désormais sénior et que j’avais droit à un entretien professionnel supplémentaire. Honnêtement, ça m’a fait un drôle d’effet !”.

Maintenant, si on regarde du côté de l’Insee ou encore de Pôle Emploi, on monte à 55 ans. Alors, admettons qu’on coupe la poire en deux, le compteur de la séniorité est lancé à 50 ans. C’est d’ailleurs l’âge retenu par Jean-Emmanuel Roux, fondateur de TeePy Job, la plateforme N°1 dédiée au recrutement des séniors.

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Les femmes seniors plus impactées que les hommes ?

Maintenant qu’on a vu ce que dit la loi ou les institutions, qu’en est-il sur le terrain ? Pour en avoir le cœur net, Frederique Jeske a lancé un sondage sur le thème afin de savoir si les “seniors” ramaient à justifier leur âge en entreprise. En 15 jours, elle a récolté plus de 550 retours et de nombreux témoignages… édifiants ! Certains professionnels étaient mis à l’écart dès l’âge de 43 ans, notamment dans des secteurs comme la presse, pub et le marketing.

Et imaginez pour les femmes, quelle sanction ! “Jusqu’à 30 ans, on nous reproche de ne pas avoir assez d’expérience. Entre 30 et 40 ans, on est souvent jeune maman ou susceptible de l’être. Il nous reste donc 5 ans pour nous réaliser professionnellement entre 40 et 45 ans..?”, s’indigne Frederique Jeske.

Mais alors, pourquoi est-on considéré comme senior si tôt ?

Alors que la réforme des retraites bat son plein, on peut s’étonner que l’on classifie comme seniors des individus âgés de seulement 45 ans qui ont encore… 20 ANS à passer dans l’entreprise ! Pour mieux comprendre ce mécanisme, Jean-Emmanuel Roux nous invite à remonter dans le temps : “Dans les années 90, les jeunes n’avaient pas de boulot. Il a donc fallu pousser les plus vieux dehors, et l’Etat a encouragé ce mouvement avec les départs en préretraite. On voyait alors des gens partir à 50, 52 ans”.

Le second phénomène coïncide avec la bulle internet des années 2000. “Il y a eu une vraie cassure entre les jeunes et les plus de 45 ans qui ont été très bousculés par les nouveaux outils, et que l’on n’a pas non plus poussés vers des formations”, relève le fondateur de TeePy. Là encore, les seniors ont été gentiment invités à laisser leur place à la relève.

Il y a Senior et Senior…

Le truc, c’est que considérer que l’on est senior à 45 ans en 2023 est un non-sens absolu. Déjà, le marché du recrutement est tendu et les entreprises ont tout autant besoin des jeunes que des seniors pour pourvoir leurs postes. Ensuite, les plus de 45 ans d’aujourd’hui ne sont absolument pas largués sur les nouvelles technologies (voir notre article relatif aux clichés sur les seniors).

Et surtout, n’y a-t-il pas un léger problème de sémantique ? Pourquoi donne-t-on le même nom à un professionnel de 45 ans en activité, et à une personne qui vit ses derniers jours en EPHAD ? Pas étonnant que l’on n’ait pas très envie d’être catalogués comme senior en entreprise, parce que cela renvoie à la vieillesse, la mort, alors que l’on pourrait louer la sagesse et l’expérience.

Et si on inventait un nouveau terme pour parler des 45-64 ans ?

Finalement, il est peut-être temps d’envoyer valser le terme de “senior” en entreprise et d’inventer un nouveau terme qui collerait beaucoup mieux à la peau de cette génération. D’autant que cette population va jouer un rôle prépondérant dans l’économie, et ce, même après l’âge légal de départ à la retraite.

En 2023, Emmanuel Macron a affiché sa volonté d’inciter les médecins à la retraite à continuer de travailler, cumulant ainsi salaire et pension de retraite, sans payer de cotisations vieillesse pour faire face au phénomène des déserts médicaux.

Alors, pour que les 45-64 ans reviennent en force dans les entreprises, trouvons-leur un nom à la hauteur de leur valeur !

Source : Ghislaine Alajouanine, Vice-présidente SFTAG, rédige une tribune libre sur la thématique suivante : « Vieillissement et innovation, un bref état des lieux ».

Paulina Jonquères d’Oriola

Journaliste

Journaliste et experte Future of work (ça claque non ?), je mitonne des articles pour la crème de la crème des médias […]

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