Je gagne plus que mon conjoint, est-ce un problème à la maison ?

En 2022, une femme qui gagne plus que son mari, ce n’est pas monnaie courante. Issue d’une famille bordelaise de médecins et de magistrats, quand Hélène a décidé de faire carrière dans le commerce il y a 25 ans, elle est passée pour une extravagante. Et ce fut pire, quand son mari a décidé d’arrêter de travailler pour s’occuper des enfants.

La cinquantaine, dynamique et pétillante, Hélène est cheffe d’entreprise, elle est membre de plusieurs conseils d’administration et gagne très, très, bien sa vie, depuis le début de son mariage. Elle a eu 3 enfants, 3 garçons âgés de 25 à 16 ans. Pour le 2ᵉ elle a pris un mois de congé de maternité, pour le petit dernier, seulement 7 jours, trop de boulot, trop de responsabilités.

“À l‘époque, ce n'était pas très bien vu, mais c’était notre choix, j’étais dirigeante d’entreprise, mon mari a pris le relai, j’étais en totale confiance, je savais que les enfants avaient leur papa à la maison”. Elle le reconnaît, sans cela, elle n’aurait pas pu mener la carrière qu’elle a eue. Mais on ne va pas se mentir, il leur a fallu être solides pour faire fi des préjugés. Hélène se souvient que, petit, le dernier de ses fils racontait à qui voulait l’entendre qu’il voulait être “chômeur comme papa”.

“On n’a jamais été gênés que mon mari soit celui qui ne travaille pas, cela n’a jamais provoqué de tensions dans notre couple, puisque chacun a trouvé sa place et son équilibre. Moi, j’ai besoin de me challenger, de mettre en danger, lui, c'est le centre du foyer. Nous formons un couple équilibré”.

Depuis 5 ans, les enfants ont grandi, il a recommencé à travailler, il est marchand de biens, “mais c’est toujours lui qui vient me chercher à l’aéroport quand je rentre de mes nombreux déplacements professionnels”.

Claire est manager dans un cabinet de consultants RH. À 33 ans, elle gagne très bien sa vie, mieux que son mari, prof d’EPS qui travaille 16 heures par semaine. C’est elle le pilier financier, celle qui assure le niveau de vie confortable de la famille. Cette jeune maman d’une petite fille d’un an ressent parfois le poids de cette responsabilité. “À mon retour de congés maternité, j’ai eu une grosse remise en question, mais je ne me voyais pas faire 35 heures avec une baisse de salaire, j’ai besoin de mes revenus, on a de grosses dépenses depuis qu’on est devenus parents”.

Ses journées commencent tôt, mais elle s’organise pour rentrer tôt et pouvoir s’occuper de sa fille avant de la coucher. Elle l’avoue, elle rallume souvent son ordi une fois l’enfant au lit.

“Mon mari trouve ça cool que je gagne plus que lui et moi, je suis fière de pouvoir subvenir aux besoins de ma famille, mais c’est une source de stress énorme”. Elle sait que c’est elle qui aura toujours le plus gros revenu du couple. Avec les responsabilités qui en découlent.

Pour les dépenses du ménage, c’est lui qui paye le loyer, les factures d’électricité, l’abonnement Internet, et c’est elle qui paye la crèche et toutes les dépenses liées à leur petite fille. Comme son salaire est plus élevé que celui de son mari, c’est elle qui met de l’argent de côté, pour payer les vacances notamment.

Elle l’avoue : “ça fait 12 ans qu’on est ensemble, et ça fait 12 ans qu’on s’engueule quand à la fin du mois, il me dit qu’il n'a plus une thune. Ça m’énerve ! Il ne sort pas, c’est un geek qui passe son temps à jouer et je ne sais pas comment il se débrouille pour ne pas arriver à mettre un peu de côté alors que c’est moi qui paye tout”.

Des coups de sang qui permettent à Claire d’évacuer la pression sur ses épaules qu’elle dit gérer plutôt bien. La plupart du temps.

Astrid a 28 ans, elle bosse aux RH d’une entreprise de commerce en ligne. Avec Lancelot, ils sont mariés depuis 3 ans. Ils ont acheté un grand et bel appartement dans la banlieue ouest de paris. Ils n’ont pas encore d’enfants. Elle gagne 15 000 euros de plus que lui par an. Mais ça ne pose aucun problème dans leur couple.

“En vrai, ça s’est inversé, au début de notre relation, il travaillait déjà et moi j’étais étudiante puis stagiaire”, explique Astrid. “Dans mon entourage, ce sont majoritairement les hommes qui gagnent plus que leurs femmes”, ajoute Astrid en haussant les épaules. “Nous, on a un compte commun qu’on alimente tous les mois et un compte perso chacun sur lequel est versé notre salaire, on fait pas gaffe, les charges, les sorties, les vacances, on partage tout, mais je suis plus facilement tentée à la dépense que Lancelot”. Mais du coup comme c’est elle qui gagne le plus, zéro complexe à craquer régulièrement sur des sites de ventes en ligne.

Olivier et Romain sont en couple depuis un an. Ils ont 25 et 24 ans. C’est Romain qui a le meilleur salaire des deux. Il est fonctionnaire d’état. Olivier, lui, est actuellement en contrat de professionnalisation comme analyste financier chez un gestionnaire d’actifs immobiliers. C’est Romain qui paye le loyer, les factures d’électricité, les assurances. Olivier n’a pas les moyens, pour l’instant, alors il essaie de contribuer du mieux qu’il peut en participant aux courses du ménage.

“On les fait toujours ensemble, mais c’est Romain qui par exemple va payer la viande”. Ça s’est mis en place naturellement, de manière assez fluide, l’argent n’est pas un sujet entre eux. Pour Romain, vivre à deux, même s’il assume le plus gros des charges, s’avère plus économique.

“Depuis qu’on vit ensemble, on sort moins, une à deux fois par semaine, on aime se faire des diners en amoureux qu’on prépare ensemble." Pour les vacances, l’été dernier, c’est Romain qui a tout pris en charge, mais il s’en fiche.

“C’est le niveau de vie du couple qu’il faut avoir en ligne de mire, ce que ça apporte à notre qualité de vie. Moi je ne comprends pas qu’on puisse se sentir émasculé parce que l’autre gagne plus, c’est plutôt une fierté d’avoir un conjoint qui réussi”, affirme Olivier. “Il ne faut pas s’arrêter à la ligne en bas d’une fiche de paye, peu importe qui gagne quoi, l’essentiel, c’est le projet de vie, de regarder vers l’avenir”, conclut Romain.