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L’IA va-t-elle chambouler le recrutement ?

Sourcer des candidats, trier des CV, faire passer des entretiens… Jusqu’où ira l’IA en matière de recrutement ? Faut-il craindre une déshumanisation du processus de recrutement ? Ou au contraire, y voir une opportunité ? Le débat est lancé.


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Toc, toc, toc, l’IA est déjà là

À la question l’IA va-t-elle chambouler le processus de recrutement, la réponse est un immense OUI. “En matière de recrutement, on y est déjà, mais cela va encore s’accélérer”, souligne Karim Cherif, Head of HR consulting chez Magellan.

Pas convaincu ? Regardez la page LinkedIn qui est certainement ouverte sur votre ordinateur. En fonction de votre profil, de ce que vous likez, commentez, on vous pousse du contenu et des offres d’emploi… tout ça grâce à l’IA.

Il est intéressant d’observer qu’avec l’intelligence artificielle, les gens sont soit terrorisés, soit exaltés, tout comme lors de l’apparition d’internet. Une chose est certaine : l’IA permet d’accélérer le processus de recrutement et les entreprises qui voudront rester dans la course à l’heure de la guerre des talents devront prendre la vague”, analyse Caroline Diard, enseignante-chercheure en management des ressources humaines.

Une IA va-t-elle finir par recruter une autre IA ?

Et que dire de Chat GPT ! Désormais, les candidats peuvent écrire une lettre de motivation et un CV comme qui rigole. “La version 4 est arrivée avec 10 ans d’avance. La société et la législation ne sont pas encore prêtes pour un tel bouleversement”, pointe Jérémy Lamri, CEO de Tomorow Theory.

D’un point de vue culturel, nous ne sommes effectivement pas encore armés pour faire face à toutes les questions éthiques qui se posent. Et d’un point de vue légal, la gestion des données pose de sérieuses questions qui ne trouvent pas encore de réponses. Absolument persuadé que l’IA va révolutionner le recrutement, Jérémy Lamri est donc convaincu que nous allons traverser une zone de turbulences les 10-15 prochaines années, le temps que les usages se décantent et que les IA soient bien entraînées et encadrées.

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Moins de CV, plus d’humanité… grâce à l’IA

Car si les candidats peuvent automatiser leur candidature, et que de l‘autre côté, les recruteurs peuvent s’appuyer sur les IA pour sourcer, trier et même faire passer des entretiens... à terme, une IA va t-elle finir par recruter une autre IA ?

Si l’on voit le verre à moitié vide : c’est flippant. Et les humains, bordel ! Mais si on voit le verre à moitié plein, on peut se réjouir que l’IA permette de dégager du temps pour ce qui compte vraiment. “Si nous arrivons à mener cette transformation, cela permettra de professionnaliser encore davantage les recruteurs et les pousser à être moins dans la recherche de CV, et davantage dans la recherche de proximité avec leurs candidats”, souligne Karim Cherif.

IA et recrutement : comment ça marche vraiment ?

Entre ce que l’IA permet de faire actuellement, et ses potentialités, le spectre intégral du recrutement est balayé. Alors, le grand remplacement de l’homme par l’IA aura-t-il lieu ? Ou l’IA demeurera-t-elle une simple aide à la prise de décisions ? Partons en exploration.

#1 - Rédaction de l’offre

Avec Chat GPT, il est possible d’écrire une fiche de poste digne de ce nom en un rien de temps. “J’ai fait le test avec une centaine d'offres d’emploi grâce à des mini briefs de 4 lignes données à Chat GPT. Et le résultat est bluffant. Car en réalité, les managers et RH ne sont pas forcément bien formés à formuler le besoin”, témoigne Jérémy Lamri.

☢️ La limite : s’assurer que l’offre correspond véritablement aux besoins du terrain et n’est pas hors-sol. Mais finalement, n’est-ce pas la même difficulté lorsque les humains s’en chargent ?

#2 - Sourcing

Trouver l’endroit le plus pertinent pour publier une offre d’emploi ? On peut imaginer demander à une IA de définir quels sont les groupes Facebook ou la page Insta la plus intéressante pour poster une annonce.  Mais aussi d’identifier quels sont les candidats les plus susceptibles d’être intéressés par l’offre. Par exemple, prédire qu’un candidat va bientôt changer d’emploi. “Pour un employeur, cela lui permettra d’élargir son bassin d’emploi”, note Caroline Diard.

☢️ La limite : “Cela va favoriser les gens qui ont une bonne présence en ligne”, prévient Jérémy Lamri. Il faudra donc aussi penser à des démarches de sourcing en présentiel, comme les traditionnels forums.

#3 - Tri des CV

Les IA sont déjà capables de trier les CV avec des systèmes de mots clefs pour détecter les candidatures qui ont le plus de potentiel, et permettre d’établir un ranking. Une IA pourrait également prédire la réussite d’un candidat en le comparant à un employé actuel de l’entreprise ayant une expérience similaire. L’objectif étant de réduire les temps de recrutement ce qui est bénéfique tant pour les candidats que les entreprises.

☢️ Les limites : Pour l’heure, ce tri est encore imparfait. De plus, “il ne faudrait pas s’en tenir uniquement à un CV pour opérer un choix”, affirme Jérémy Lamri. On ne recrute pas des individus uniquement sur leurs compétences, mais aussi sur leur potentiel et leur capacité d’adaptation.  Il faudra donc s’assurer de trouver ces informations quelque part dans le processus de recrutement.

#4 - Évaluation du candidat

Les tests de personnalité et de compétences générés par l’IA existent déjà (c’est la spécialité d’entreprises comme PerformanSe ou Maki).  “Cela permet en réalité de fusionner avec l’étape précédente : on évalue directement et donc préqualifie le candidat dans le même temps”, souligne Jérémy Lamri.

D’ailleurs, saviez-vous que l’entreprise Obo world a mis au point des agents virtuels capables de faire passer des entretiens de préqualification avec des questions classiques sur la disponibilité, le niveau de salaire, l’expérience ou encore la distance au lieu de travail en temps, ainsi que quelques questions sur la maîtrise technique du poste ?

☢️ Les limites : Tous les candidats n’aimeront pas être interviewés par une IA. “Mais il pourrait être intéressant de proposer différentes alternatives et laisser le candidat choisir la façon dont il aimerait être recruté”, pointe Jérémy Lamri. De son côté, Karim Cherif renchérit sur l’importance de garder des humains dans le processus, surtout au moment de la prise de décisions : “les recruteurs vont vraiment devoir se professionnaliser encore davantage pour mieux détecter les personnalités et moteurs de chaque candidat”.

Human After All

L’humain, ultime maître à bord ? Mathieu Masclez, fondateur d’Obo world, l’assure : “Le recruteur peut choisir lui-même les candidats à contacter. Cependant, le principe est de gagner en temps, en efficacité et objectivité. Nous avons créé notre solution en excluant les biais humains afin que les compétences soient le premier choix. Ainsi, la diversité, l’inclusion sont garanties. Bien sûr, l’humain recrute in fine et les choix subjectifs peuvent resurgir”. Ainsi, l’inclusion est garantie jusqu’à l’intervention humaine. Et si c’était ça la véritable avancée de l’IA ?

Paulina Jonquères d’Oriola

Journaliste

Journaliste et experte Future of work (ça claque non ?), je mitonne des articles pour la crème de la crème des médias […]

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