L’inflation, nouveau remède contre la Grande Démission ?
En France, le dynamisme du marché de l’emploi profite aux salariés désireux de changer de job. Ça bouge ! C’est pas encore le dancefloor du Berghain mais on ne va pas faire les fines bouches. Cependant, le contexte économique incertain ne va-t-il pas calmer les ardeurs de certains démissionnaires ? Voici quelques éléments de réponse.
Entre la fin de 2021 et le début l’année 2022, 520 000 personnes ont démissionné de leur poste en France, dont 470 000 étaient titulaires d’un CDI. Pour vous poser le truc, c’est un peu comme si toute la ville de Toulouse posait sa dem, là, comme ça. Plus de saucisse, plus de cassoulet, l’enfer… Bref, ça fait quand même 2,7% des salariés, soit le taux le plus élevé depuis la crise financière de 2008.
Mais comme souvent, nous, Français, sommes encore loin du gigantisme américain. En effet, le pays de l’oncle Sam a subi un véritable tsunami sur le marché de l’emploi. « The Big Quit » en VO, ou la « Grande Démission » pour la version VF désignent les départs de 48 millions de personnes soit ni plus ni moins qu’un tiers la population américaine en âge de travailler. Une tendance pas franchement à la baisse puisque chaque mois, 4 millions de salariés décident encore de quitter leur poste.
États-Unis et France ne vivent pas dans le même monde
Alors what the F is going on? Les Américains seraient-ils insensibles face à l’inflation et au risque de récession ? Not at all. C’est au contraire la bonne santé économique des States, où la croissance a atteint 2,6% au troisième trimestre tandis que la hausse des prix ralentit fortement, qui continue de leur donner des ailes (d’aigle) (parce que l’aigle c’est le symbole de… bref t’as capté).
C’est de manière générale beaucoup moins le fuego en Europe, où la récession, et ses deux trimestres consécutifs de croissance négative, est annoncée par les autorités de Bruxelles comme imminente. En gros, ça risque de cogner, une fois. Grâce à une inflation plus faible et une croissance qui ralentit gentiment, la France semble pour l’instant en meilleure santé que ses potos de l’Union Européenne. Mais tout cela reste aussi fragile que relatif. Hausse des prix de l’énergie, des produits alimentaires… Le portefeuille des Français se fait lui aussi bien léger.
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L’équation de la Grande Démission à la française
Une lueur dans la nuit cependant ! Le dynamisme du marché du travail tricolore – marqué par des pénuries d’emplois persistantes dans de multiples secteurs, de l’industrie manufacturière aux services, sans oublier le bâtiment – encourage les salariés désireux de changer de job. Comme le soulignent les experts de la Dares, “le niveau élevé des démissions est à relativiser au vu des tensions actuelles sur le marché du travail”.
En gros, le monolithe déifié qu’est le plein-emploi crée mécaniquement des opportunités pour les salariés, ce qui se reflète dans des retours au travail rapides : huit démissionnaires sur dix sont de nouveau en poste dans les six mois suivant leur départ. Ces statistiques nous ont ainsi permis de mettre au point cette formule savante : “ciao + je quit = je re-job asap”. Autrement dit, le niveau de démissions pourrait donc demeurer important, du moins tant que les besoins en recrutement restent élevés.
Jouer la montre
“L’évolution du marché de l’emploi joue en faveur des salariés”. Comme toujours, le bonheur des uns fait le malheur des autres et dans certains secteurs, ce sont les entreprises qui trinquent, peinant à conserver leurs talents et plus particulièrement les jeunes. Pour les jobs aux horaires exigeants et à la charge de travail importante, les moins de 35 ans n’hésitent effectivement plus à partir, même en cas de proposition d’une augmentation de leurs salaires.
“La prudence voudrait, au vu d’une année 2023 unanimement prédite comme difficile, que les titulaires d’un CDI ne prennent pas le risque d’un départ volontaire, décrypte un économiste spécialisé dans le marché du travail. Mais les conséquences de la crise sanitaire se font toujours sentir, avec des aspirations différentes. Face à un risque économique encore hypothétique, les salariés qui ont des envies d’ailleurs se sentent en sécurité.”
Bon, on n’est pas tiré d’affaire mais force est de constater que les gens prennent ou reprennent possession de leur destin professionnel et ça, c’est pas rien. Toutes les petites victoires se fêtent messieurs-dames alors go démonter un gros cassoulet toulousain et direction le dancefloor du Berghain.