“Le leader de demain travaillera à temps partiel” (par Marie Pellerin)
Travailler à temps partiel est-il l’avenir du travail ? L’idée n’étant pas forcément de moins bosser, mais de mieux bosser. Et si possible, même, de le faire dans plusieurs boites à la fois. Idée folle ou vision claire ? Une tribune signée Marie Pellerin, fondatrice de Parents on board.
“T’es slasheur ? Stylé !”
“T’es à temps partiel ? Tu manques d’ambition…”
Mais pourquoi tant de haine ?!
Dans notre culture du travail, qui valorise encore le temps passé par rapport à la valeur créée, le temps partiel a toujours eu mauvaise presse. Pourtant, quand il est choisi, il répond à des besoins de flexibilité et de liberté de plus en plus pressants aujourd’hui chez les salariés. Et il est véritablement source de richesses pour l’entreprise.
D’ailleurs, qu’est-ce qu’on a fait ? On a inventé d’autres concepts pour faire du temps partiel sans le dire : la semaine de 4 jours, le temps partagé, le freelancing, le slashing, le jobsharing etc. Au fond, l’intention est la même à chaque fois : garder du temps dans sa semaine pour faire autre chose que son job principal.
Un leader, plusieurs écosystèmes
La posture de leader évolue. Demain, le leader se devra d’être présent dans plusieurs écosystèmes, capable de s’en inspirer et de les orchestrer à bon escient pour innover : s’investir dans une association professionnelle ou sociale, animer des conférences, exercer un deuxième métier, une activité sportive ou artistique, consacrer du temps à l’éducation de ses enfants ou s’occuper d’un proche.
Dans toutes ces situations, le salarié ne travaille pas directement pour son entreprise, c’est vrai. Mais en ayant la possibilité d’évoluer en dehors de son organisation, il développe son réseau, tisse des liens, acquiert des compétences complémentaires, gagne en visibilité, développe de nouvelles idées, se confronte à des benchmarks, etc. Cela contribue à nourrir et à faire rayonner l’entreprise auprès de ses partenaires, concurrents, futurs salariés, clients. Et à renforcer sa marque employeur.
Le temps partiel, lorsqu’il est choisi par le salarié et bien encadré par l’entreprise, est donc gagnant-gagnant, car il permet la multiactivité. Flexibilité et conciliation pro/perso pour le salarié, rayonnement et création de valeur pour l'entreprise. Comme pour la semaine de 4 jours, l’idée n’est pas d’avoir un weekend prolongé, mais bien de donner la possibilité aux salariés de s’épanouir dans une autre activité en dehors de leur organisation, qu’elle soit lucrative ou non.
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Le concept d’entreprise étendue
De la même manière, l’entreprise de demain ne se limitera plus à ses propres murs mais devra aussi s’ouvrir sur l’extérieur pour diffuser ses idées et se nourrir de celles des autres. Le changement est déjà en route.
Notamment pour faire face à la pénurie et à l’obsolescence des compétences, l’entreprise doit s’adapter et s’ouvrir à de nouvelles façons de travailler. Apprendre à “partager” ses leaders et à ne plus les avoir au bureau 5 jours sur 7, sous la main. Laisser l’opportunité à ses salariés d’être présents dans plusieurs écosystèmes, cela nécessite de revoir la manière dont on a organisé le travail ces 30 dernières années.
Faire fi du présentéisme et reconsidérer les indicateurs de performance au travail. Désormais, le contrôle du temps de travail ne suffit plus à mesurer la productivité. Au contraire, il contraint la création de valeur et frustre les individus. Être présent 100% du temps ne signifie plus être productif, ni performant.
Avons-nous besoin de toutes les compétences… tout le temps ?
Mais alors, quels autres indicateurs pour quel profil d’entreprise ? Comment évaluer la performance humaine et relationnelle, l’engagement des salariés ou encore les zones d’influence dans lesquelles évoluent les (futurs) collaborateurs ? Et surtout, comment collecter la data de façon objective ? De plus en plus d’entreprises se penchent sur cette question en considérant que la performance ne se lit plus à travers les seuls indicateurs économiques et financiers.
Développer une approche des ressources humaines par compétences. C’est-à-dire s’appuyer sur une liste de skills (hard & soft) requis pour un poste, plus que sur une liste de tâches correspondant à ce poste. Et faire le tri entre les compétences dont on a besoin tous les jours, toute l’année, et les compétences dont on a besoin sur des périodes plus courtes, voire ponctuellement. Par exemples :
- 1 salarié à temps partiel pour des compétences dont on a besoin 3 jours sur 5.
- 1 salarié à temps partiel annualisé pour des compétences dont on a besoin 8 mois par an.
- 2 salariés en jobsharing sur un même poste pour un relais de compétences entre un profil junior et un profil senior.
- 1 expert en freelance pour compléter un besoin ponctuel sur des compétences spécifiques.
L’entreprise de demain devra être prête à accueillir et à accompagner une multitude de statuts différents, salariés et non-salariés, et les préparer à travailler ensemble en mode projet.
Le temps partiel : un avantage compétitif ?
Alors, manque d’ambition ou future of work ? C’est une question que nous avons posée récemment à notre communauté de talents chez Parents on board. 100% des répondants ont choisi la deuxième option, mais beaucoup nous ont aussi partagé leurs difficultés à trouver un poste à temps partiel et correspondant à leur évolution de carrière.
Le temps partiel, lorsqu’il est choisi et qu’il ne met pas le salarié en situation de précarité financière, et lorsqu’il est utilisé à bon escient par l’employeur, n’apporte que des avantages. C’est une option synonyme de flexibilité, de déploiement des compétences, d’ouverture, d’épanouissement, de créativité et d’agilité.
Qu’attendons-nous ?