Tribune – La semaine de 4 jours : une clé majeure pour l’égalité femmes-hommes
Il y a mille et une raisons de penser à la semaine de 4 jours. Mais parmi celles qu’on évoque peu… la lutte contre les inégalités femmes-hommes. Une tribune signée Philippe du Payrat, co-fondateur de 4days.work
Le succès professionnel des hommes a longtemps reposé sur une réalité cachée : les femmes assument la majorité du travail non rémunéré à la maison. En 2024, cette injustice persiste. Dans la majorité des foyers en France, il s'agit de semaines de dix jours travaillés à l'extérieur, hommes et femmes.
Et la plupart des femmes, qui jonglent entre leurs carrières et des responsabilités domestiques accrues, en pâtissent.
L’injustice invisible : la double journée
En France, 80 % des temps partiels sont occupés par des femmes. Ce choix n’est pas vraiment volontaire, il est imposé par une société qui continue de croire que les femmes doivent porter le fardeau des tâches ménagères et familiales. Résultat ? Leur carrière stagne, leurs salaires sont inférieurs et leurs retraites en souffrent. Une femme sur deux réduit son activité professionnelle après l’arrivée de son premier enfant, contre seulement un homme sur neuf.
Ces chiffres révèlent une réalité simple, mais cruelle : le marché du travail tel qu'il existe n’est pas conçu pour les femmes. Les attentes professionnelles n'ont pas évolué avec les réalités modernes. Pendant que les hommes progressent, les femmes paient le prix de cette inégalité, à la maison comme au travail.
La semaine de 4 jours : une solution concrète
La semaine de 4 jours n’est pas une utopie. C’est une réponse réaliste à un problème systémique. Que ce soit en Nouvelle-Zélande, Andrew Barnes, fondateur de Perpetual Guardian, en France avec Laurent de la Clergerie de LDLC, ou parmi les 350 entreprises que nous avons accompagnées avec le 4 Day Week Global : les études ont prouvé que travailler 32 heures sans perte de salaire ne réduit pas la productivité. Au contraire, elle l'augmente de tout en réduisant l'absentéisme et en améliorant le bien-être des employés.
Des centaines d’entreprises à travers le monde adoptent désormais ce modèle, et le pilote national menée par 4jours.work, se lance en France fin 2024.
Les entreprises pilotes de la semaine de 4 jours en Australasie ont démontré que 27 % des hommes ont augmenté leur participation aux tâches domestiques après l’adoption de la semaine de 4 jours (4 Day Week Global 2023). C’est plus que le double des femmes, révélant un début de rééquilibrage. Le chemin est encore long, mais il est clair : la semaine de 4 jours est un outil puissant pour favoriser un partage plus équitable des responsabilités familiales, et redonner aux femmes la possibilité de faire la même carrière que leurs homologues masculins.
Les femmes en première ligne
Les 8 à 10 millions d’aidants en France, dont une majorité sont des femmes actives, sont des héroïnes invisibles. Elles jonglent entre un emploi rémunéré et un travail non rémunéré pour leurs proches. Cette situation contribue directement à leur épuisement. L'étude de McKinsey-Leanin.org révèle que 42 % des femmes déclarent être en burn-out, contre 35 % des hommes. Le chiffre grimpe à 50 % chez les femmes managers. Pourquoi ? Parce qu’en plus de gérer leur carrière, elles doivent s’occuper de la maison, des enfants, des proches.
Les femmes sont les grandes perdantes de ce modèle. Une sur trois a envisagé de quitter le marché du travail à cause de cette pression insoutenable. En libérant une journée de travail par semaine, la semaine de 4 jours leur offre non seulement un souffle, mais aussi un regain de productivité, une meilleure qualité de vie et une santé mentale plus solide.
Un modèle gagnant-gagnant pour les entreprises
La semaine de 4 jours n'est pas seulement une question d'équité sociale. C'est aussi une stratégie économique intelligente. Des études montrent qu’en réduisant le nombre d’heures travaillées sans perte de salaire, les entreprises augmentent la productivité, diminuent l’absentéisme et améliorent l'engagement de leurs employés. 73 % des femmes souhaitent passer à la semaine de 4 jours, 6 points de plus que les hommes (Politis, 2024). Elles savent que ce changement peut être un tremplin vers des carrières plus épanouissantes et équitables.
En Australie, les hommes ayant testé la semaine de 4 jours ont passé plus de temps avec leurs enfants et se sont impliqués davantage dans les tâches ménagères. Cette évolution pourrait enfin soulager les femmes, permettant un meilleur partage des responsabilités domestiques. Ce n’est pas seulement un rêve féministe. C’est une réalité économique.
Pourquoi agir maintenant ?
Le modèle actuel n’est pas viable. 42 % des femmes en risque de burn-out, des carrières sacrifiées et des millions d’aidantes épuisées. Est-ce vraiment le monde du travail que nous voulons maintenir ? Le temps est venu de repenser la manière dont nous travaillons. La semaine de 4 jours n’est pas une option, c’est une nécessité.
Tout comme Henry Ford a changé le cours de l’histoire en instaurant la semaine de cinq jours au début du XXe siècle, il est temps pour les entreprises d’adopter une nouvelle norme qui répond aux réalités modernes. Les femmes ne devraient plus avoir à choisir entre une carrière et une vie de famille épanouie. La semaine de 4 jours peut redéfinir cet équilibre.
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La semaine de 4 jours : une mesure juste et performante
La semaine de 4 jours est plus qu'une réforme du temps de travail. C’est une révolution pour l’égalité femmes-hommes. Elle permet non seulement de rendre justice aux femmes qui portent trop longtemps un poids invisible, mais aussi d’optimiser les performances des entreprises en leur offrant des employés plus engagés, moins stressés et plus productifs.
Les entreprises qui se soucient de leur avenir ne peuvent plus ignorer cette évidence. Il est temps d’agir, pour les femmes, pour les hommes, pour les familles, et pour un monde du travail plus juste.
La question n'est pas de savoir si nous devons adopter la semaine de 4 jours, mais pourquoi ne l’avons-nous pas déjà fait ?