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Handicap : évitons ces questions et comportements maladroits au travail

S’il s’agit le plus souvent de maladresses plutôt que de malveillance, les comportements ou propos déplacés sur le handicap en milieu professionnel sont légion.  Même si de nombreuses personnes désirent “bien faire”, leur attitude peut être perçue comme intrusive, infantilisante ou inappropriée. Et oui, le chemin de l’enfer est pavé de bonnes intentions !


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Au travail comme dans la vie de tous les jours, la plupart des gens tentent de se comporter au mieux face à une personne en situation de handicap. Sauf que, en voulant lui porter une attention excessive... on la ramène constamment à sa situation. Dans le même temps, ignorer le handicap est encore plus dévastateur.

Alors, comment trouver le juste équilibre dans ses propos comme dans ses actes ? Voici quelques exemples et anecdotes qui devraient vous permettre de mieux comprendre ce que ressentent – et attendent – les personnes en situation de handicap.

Quelques exemples concrets de maladresses

Vouloir aider sans demander

Adrien de Villepoix, fondateur de Handi by Andy – et atteint d’une hémiplégie – nous raconte une anecdote durant laquelle, en aidant naturellement un homme à porter sa valise, celui-ci s’est offusqué en découvrant qu’Adrien était en situation de handicap : “Il a voulu m’arracher la valise des mains, comme si j’étais incapable de la porter. Sauf que si je l’ai prise, c’est que je le pouvais !

Ce type de réaction est lié au réflexe du “sauveur” que certaines personnes adoptent face au handicap. “Bien entendu, elles pensent bien faire, mais c’est une manière de nier l’autonomie de l’autre”, ajoute-t-il.

Juger sans comprendre les difficultés invisibles

En matière d’invalidité, les choses se corsent d’autant plus quand le handicap est invisible. Adrien nous explique être également atteint de troubles dys qui rendent l’écriture très difficile pour lui. “J’ai reçu des remarques sur mes fautes d’orthographe de la part de mes managers, alors que ce n’est pas ma faute. J’aurais beau tout faire pour éviter ces erreurs, je n’y arriverai pas”, dit-il.

De même, les aménagements de travail spécifiques (télétravail, pauses plus fréquentes, horaires adaptés, jours de congés supplémentaires) suscitent parfois des incompréhensions. “Pourquoi a-t-il droit à ça et pas moi ?”, une remarque fréquente qui découle d’un manque de sensibilisation aux handicaps invisibles et d’une incapacité des “neurotypiques” à se projeter dans les difficultés de l’autre.

Des mots qui blessent

Vice-présidente en charge de l’inclusion à la CPME et atteinte d’un handicap invisible qui complique sérieusement sa marche, Dominique du Paty de Clam nous explique entendre encore aujourd’hui des expressions extrêmement violentes sur le handicap. “J’ai souvent entendu des gens dire ‘il est cotorep’ ou ‘neuneu’, sans mesurer la portée de leurs mots”, regrette-t-elle.

Pourtant, le choix des mots est essentiel. Outre ces propos carrément discriminatoires qui devraient être enterrés une bonne fois pour toutes, les personnes en situation de handicap préfèrent souvent qu’on parle d’elles d’abord comme des individus, avec des compétences et des traits de caractère, et non uniquement sous l’angle du handicap.

L’omission et l’indifférence

Ne pas prendre en compte les besoins spécifiques des personnes en situation de handicap peut être tout aussi blessant que des remarques mal placées. Dominique partage ainsi une expérience où, malgré avoir signalé ses difficultés avec les escaliers, une réunion a été organisée au cinquième étage sans ascenseur. “Ce n’est pas seulement les marches qui blessent, mais le fait qu’on n'en ait rien à faire”, regrette-t-elle.

De son côté, Marylène Henry, Directrice des Ventes chez VAL Solutions et porteuse d’une hémiplégie congénitale, souligne aussi l’importance de l’anticipation bienveillante : “Lorsque l’on sort déjeuner avec des clients ou des collègues et que je marche plus lentement, soit je dois courir pour suivre la conversation, soit je reste en arrière et je rate de nombreuses informations. Ce sont ces petites attentions qui font la différence”, nous explique-t-elle.

Les propos déplacés

Dans d’autres situations, certaines personnes se permettent d’être très intrusives malgré le faible niveau de proximité avec la personne en situation de handicap. “On m’a déjà demandé ce qui m’était arrivé, si c’était ou non génétique et si c’était la raison pour laquelle je n’avais pas d’enfant par crainte de transmettre mon handicap”, nous raconte Marylene.

Pour elle, il s’agit ici d’une forme de curiosité mal placée. “Ce n’est pas que je cache mon handicap, mais c’est plutôt l’intention qui se cache derrière certaines de ces questions qui me dérange”, analyse-t-elle.

Alors, comment trouver le bon équilibre ?

Ne pas agir à la place de la personne

Vouloir aider sans que l’aide soit demandée peut être perçu comme infantilisant. Il vaut mieux attendre que la personne exprime un besoin plutôt que de présumer ce qui lui conviendrait. En entreprise, cela signifie aussi laisser la personne concernée initier la démarche pour parler de son handicap.

Nous ne vivons pas tous notre handicap de la même façon. Nous n’en sommes pas non plus tous au même stade d’acceptation. Pour ma part, j’ai grandi avec mon handicap, mais 85% des personnes handicapées le deviennent au cours de leur vie. C’est pour cela qu’on ne peut rien présupposer”, souligne Adrien.

Ne pas faire semblant de rien

L’excès inverse – ignorer totalement la situation – est également problématique. Un collègue qui boite et grimace de douleur préférera souvent qu’on lui demande simplement : “ Ça va aujourd’hui ?” plutôt qu’un silence gêné qui minimise son inconfort.

Être attentif à l’impact des mots

Certains termes sont à éviter, mais d’autres peuvent être employés avec humour par les personnes concernées. Par exemple, une personne en fauteuil roulant peut plaisanter en disant “de toute façon, je ne vais pas te courir après”, ou encore “ça roule pour moi ne t’inquiète pas”. La communication doit donc être adaptée à la personnalité de la personne en situation de handicap, et surtout du degré de proximité que l’on a avec celle-ci.

Laisser tomber les préjugés

Que ce soit dans la vie personnelle ou professionnelle, il vaut mieux ne pas projeter d’a priori sur les gens qui nous entourent. Marylène raconte qu’un manager redoutait son arrivée en pensant qu’elle aurait un handicap mental et ne pourrait pas assumer ses missions. Ces préjugés nuisent aux opportunités des personnes en situation de handicap.

Les bienfaits de la délicatesse

Au final, le plus important est d’adopter une posture ouverte et bienveillante, en laissant la personne exprimer ses besoins. Il ne s’agit ni de nier le handicap, ni d’en faire un sujet central. Un simple “si jamais tu as besoin de quelque chose, n’hésite pas” vaut souvent mieux qu’une intervention maladroite ou une indifférence totale.

De même, penser de soi-même à se mettre à la hauteur d’une personne en fauteuil roulant, afin qu’elle ne soit pas en posture d’infériorité symbolique, est une manière de faire preuve de délicatesse.

Le respect passe donc par l’écoute et l’adaptation, sans surprotection ni omission. Une bonne communication permet d’éviter bien des maladresses et de créer un environnement plus inclusif pour tous.

Paulina Jonquères d’Oriola

Journaliste

Journaliste et experte Future of work (ça claque non ?), je mitonne des articles pour la crème de la crème des médias […]

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