Du mobilier toujours plus “flex” pour travailler : bonne ou mauvaise idée ?

Au moment où j’écris cet article, me voilà installée sur mon “ballon de bureau”, spécialement prêté pour l’occasion par l’entreprise Bloon. La promesse de cet élégant objet gris chiné (proche parent du légèrement moins design “swiss ball” que j’utilisais durant ma grossesse) ? Me permettre de travailler tout en accomplissant trois actions magiques : renforcer mes abdos (welcome summer body), tonifier mes lombaires et améliorer ma circulation sanguine. À la différence d’une assise classique, le ballon de bureau exige un maintien de la ceinture abdominale pour demeurer en équilibre (et éviter donc de se vautrer par terre). “Ce mobilier est très intéressant pour le gainage et la position de hanche. Mais il est vrai que le risque de chute est existant, j’ai déjà constaté un accident de travail avec une personne qui s’est cassé le bras avec ce type de mobilier”, nous explique le Dr Jean Caron, médecin du travail au Ministère de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique.

Le siège ballon, à mettre seulement sous des fesses averties ? Pour ma part, j’ai l’habitude d’utiliser ce type d’objet au sport et je dois dire que son utilisation alternée avec le fauteuil classique, notamment en exécutant des mouvements circulaires avec le bassin, est plutôt agréable. Pour une version encore plus safe, le médecin du travail recommande d’opter pour ce que l’on appelle un “siège ballon” avec des roulettes autobloquantes et un petit dossier pour éviter tout risque de chute en arrière.

Mais le siège ballon n’est pas le seul petit malin à vouloir se faire une place dans nos vies (de bureau). Particulièrement scruté par les professionnels de santé, le bureau réglable en hauteur nous promet de son côté de pouvoir alterner entre les positions assise, semi-assise et debout. Pour le Dr Jean Caron, voilà un objet qui est tout sauf gadget. “Cela fait plus de 20 ans que les études scientifiques ont montré ses bienfaits sur les dorsalgies et cervicalgies notamment. C’est intéressant aussi pour la productivité, le mental et la concentration”, affirme le spécialiste. À savoir que si l’on ne peut pas se payer la Rolls Royce des bureaux, il existe une version plus modeste avec le convertisseur de bureau. Une plateforme qui permet de surélever son ordinateur et ainsi de pouvoir travailler en station debout.

Pour celles et ceux qui rêvent de grimper le col du Galibier tout en tapotant sur leur clavier d’ordinateur, il existe des vélos de bureau. Le Dr Jean Caron en a observé l’utilisation dans certaines écoles auprès d’enfants hyperactifs, et les résultats des tests sont probants en matière de concentration. “Mais attention, il ne faut pas s’imaginer utiliser ce type de dispositif toute la journée : 30 à 45 minutes par jour semblent être une durée adaptée. Comme pour tout mobilier, il est important d’analyser les tâches qui vont être exécutées au préalable”, recommande-t-il. En l'occurrence, le vélo-bureau convient bien à des tâches plutôt passives, comme participer à une conférence, une formation ou une réunion (dans l’hypothèse où, no offense, votre participation ne serait pas très active).

Pour celles et ceux qui ont des tâches difficilement compatibles avec le vélo bureau, le médecin du travail recommande aussi l’usage des pédaliers elliptiques de bureau avec un petit moteur intégré (permettant une initiation du mouvement sans déconcentration). Ces derniers sont à préférer aux pédaliers circulaires. Dans tous les cas, il ne faut jamais que les genoux touchent le plan de travail.

Ce qu’il faut retenir au sujet de ce mobilier flexible, c’est que tout doit s’utiliser en alternance. “En ergonomie, il n’existe pas une position idéale. Il s’agit d’éviter les postures contraignantes et trop prolongées”, poursuit notre médecin. Il convient aussi de rappeler “qu’anthropométriquement” parlant, notre corps n’est pas fait pour rester en position assise toute la journée. “Nous sommes génétiquement programmés pour marcher”. Dans le cadre d’une réflexion RH, le Dr Caron recommande de bien se poser sur l’usage au préalable afin d’éviter les tollés. “Cela ne doit pas être un choix univoque de l’employeur, c’est important de demander aux salariés leur avis”, ajoute-t-il.

En revanche, face au fléau de la sédentarité, il en est convaincu : les pays scandinaves sont la voie du futur, alors qu’ici en France, on ne semble pas encore avoir pris la mesure de ce qui est en passe de devenir un grave enjeu de santé publique. Alors, si pour une fois, la bureau(cratie) pouvait s’en mêler et inciter à l’usage de ce mobilier plus flex pour promouvoir le mouvement, voilà qui serait une bonne initiative !