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Est-ce que j’ai la flemme ou est-ce que je suis fatigué ?

Il est parfois difficile de différencier ces états qui nous plongent dans l’apathie. Une chose est pourtant certaine : il s’agit de deux réalités distinctes. Leur point commun ? Flemme et fatigue ont des choses à nous dire si tant est qu’on accepte d’écouter son corps et son esprit…


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Vous n’avez plus la pêche en allant au bureau ? Vous êtes passé maître dans l’art de la procrastination ? Un état qui vous plonge certainement dans la culpabilité et vous interroge : ai-je la volonté d’un koala qui paresse plus de 20H par jour, ou suis-je tout bonnement fatigué.e ?

Et bien la première manière de distinguer flemme et fatigue est assez simple : la fatigue est mesurable factuellement. “C’est une perte de capacités. Ce n’est pas que l’on n’a pas envie de travailler, c’est que l’on ne peut pas”, explique Julie Garel, consultante en psychologie du travail et spécialiste du burnout. Pour Valérie Climent Questroy, psychologue clinicienne et psychothérapeute, “la fatigue est un vrai signal que le corps nous envoie parce qu’il a besoin de repos et de récupération, y compris psychique”.

La flemme,elle, est davantage d’ordre psychologique (bien que la fatigue soit à la fois physique, mentale et psychique). Si on devait schématiser, avec la flemme, on est davantage dans le “je ne veux pas”. “On perd de vue l’objectif du pourquoi et pour quoi on doit accomplir telle ou telle tâche”, poursuit Julie Garel. Mais alors, peut-on avoir la flemme et se sentir fatigué ? “D’une manière triviale, avoir la flemme, c’est se sentir mou. Mais l’état physiologique est différent. Dans le cas de la fatigue, il y a toute une série d’alarmes qui se mettent en route”, ajoute Valérie Climent Questroy.

Retour de flemme : un sujet plus sérieux qu’il n’y paraît

On utilise souvent l’expression “j’ai la flemme”. Mais comprend-t-on réellement les ressorts qui se cachent derrière cette notion ? D’après Valérie Climent Questroy, il existe 5 facteurs impliqués dans l’apparition de la flemme.

#1 - Le manque de motivation. Il en existe deux sortes : la motivation intrinsèque, qui découle du plaisir personnel que l’on éprouve en faisant une activité. C’est elle qui crée de l’engagement. À l’opposé, la motivation extrinsèque résulte de récompenses extérieures (l’argent par exemple), ou de l’évitement de la punition. Celle-ci est moins efficace sur le long terme. “Or, si on a la flemme, c’est peut-être parce que justement, on n’a pas bien identifié ses facteurs de motivation intrinsèque”, affirme la psychologue clinicienne.

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#2 - La procrastination. Retarder ou éviter des tâches qui demandent un effort ou peuvent paraître désagréables est une autre composante de la flemme. “La procrastination est liée à des difficultés d’autorégulation émotionnelle : on privilégie les récompenses immédiates plutôt que de viser un objectif à plus long terme ”, explique la spécialiste. Le perfectionnisme peut également expliquer la procrastination. Il peut créer une montée d’anxiété que la procrastination soulage. Les personnes perfectionnistes peuvent être particulièrement sujettes à ce mécanisme. Elles veulent si bien faire qu’elles préfèrent parfois être dans l’évitement.

#3 - La difficulté à planifier, organiser ou hiérarchiser une tâche. Toutes ces fonctions exécutives sont contenues dans le cortex frontal et peuvent être impliquées dans la flemme. On peut observer des difficultés à contrôler son impulsion, ses distractions, et donc à mener à bien ses objectifs.

#4 - Le déséquilibre perçu entre l’effort à fournir et la récompense. Dans le monde de la psychologie du travail, c’est ce que l’on appelle “l’impuissance apprise”, lorsque l’effort fourni n’apporte pas le résultat escompté, ou qu’on a l’impression de ne plus avoir le contrôle de la situation.

#5 - Les biais cognitifs et distorsions de pensée. Il s’agit de raccourcis de pensée, de schémas qui peuvent provoquer de la flemme. Par exemple : minimiser ou au contraire surestimer un effort à produire.

La fatigue : une pente glissante en vue !

La fatigue est une série d’alarmes envoyées par le corps pour nous inciter à ralentir. La fatigue forme un continuum : si on ne l’écoute pas, elle peut se transformer en épuisement puis - dans des cas extrêmes - en burnout. À ce moment-là, le corps, éreinté, se met en mode “off”. Tout effort du quotidien, aussi minime soit-il, devient impossible à réaliser. “C’est comme si un fusible explosait”, décrit Julie Garel.

Pour éviter d’en arriver là, il convient donc de détecter les signaux faibles de la fatigue. Il y a bien sûr le ressenti de chaque individu sur sa jauge d’énergie, l’impression de manquer de sommeil, les petits maux qui se déclenchent, etc.

Mais il existe également des signaux propres au monde du travail comme :

  • le fait de vérifier plusieurs fois si l’on a bien réalisé une tâche,
  • la sensation de travailler dans l’urgence, de manquer constamment de temps,
  • l’impression de manquer de moyens, même si on demeure motivé

Cette fatigue conduit souvent à s’isoler, ce qui n’est malheureusement pas un bon réflexe. On pourrait se confier à un collègue, mais on perçoit souvent cela comme un aveu de faiblesse”, remarque la psychologue. Une organisation toxique et une faible estime de soi sont également d’autres facteurs qui risquent de mener à la fatigue puis à l’épuisement puisque l’on va tenter d’en faire toujours plus pour obtenir de la reconnaissance.

À noter que chez les femmes, les alarmes physiologiques de la fatigue ont tendance à se déclencher plus tard, car celles-ci ont l’habitude d’être dans le multitasking. “Leurs limites psychologiques sont plus lointaines. Ceci étant dit, la fatigue est perçue comme un sentiment d’impuissance pour les hommes, ce qui fait qu’ils peuvent eux-aussi aller jusqu’à l’épuisement”, poursuit l’experte.

Ce que la flemme et la fatigue ont à nous apprendre

Pour Julie Garel, il est possible de percevoir la flemme comme quelque chose de positif, car elle traduit la fin de quelque chose (tâches, objectifs…) et donc le début d’une nouvelle période propice pour se questionner sur nos facteurs de motivation intrinsèque. C’est l’occasion de se réaligner avec ses valeurs, ses goûts, ses souhaits, ses désirs.

Mais aussi de prendre conscience de ses limites, pour mieux les respecter et ainsi prendre soin de sa santé mentaleParfois, la flemme peut aussi être le signe qu’on lâche prise, ce qui est positif”, ajoute Valérie Climent Questroy.

Quant à la fatigue, elle est en réalité une protection de notre corps. Cette fabuleuse machine sait se faire doublement entendre en cas de besoin. En effet, on peut distinguer deux types de fatigue : la fatigue nerveuse et la fatigue physiologique. La fatigue nerveuse correspond à un épuisement lié à une période d'anxiété ou de stress. Quant à la fatigue physiologique, elle est associée à un manque de ressources.

Elle ajoute enfin que flemme et fatigue peuvent être l’arbre qui cache la forêt. Parfois, des symptômes dépressifs sont sous-jacents. Il convient donc de rester vigilant lorsque la fatigue et/ou la flemme sont installées depuis plus de deux semaines.

Bien entendu, ne sombrons pas dans le pathos ! Un coup de flemme ou de fatigue ne signifie pas que l’on va nécessairement passer les mois suivants sur le divan. En revanche, il faut prendre le temps d’écouter son corps et sa psyché pour ranimer… la flamme.

Paulina Jonquères d’Oriola

Journaliste

Journaliste et experte Future of work (ça claque non ?), je mitonne des articles pour la crème de la crème des médias […]

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