société

La température du bureau, c’est aussi un sujet d’inégalité femmes-hommes (si si, c’est vrai)

Dans le monde de l’entreprise, les questions d’inégalités femmes-hommes se nichent parfois là où on ne les attend pas… jusque dans le thermostat d’un climatiseur ou radiateur ! On vous explique pourquoi.


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Hiver comme été, la sempiternelle question de la température souffle le chaud et le froid au bureau. Plus particulièrement, elle divise les hommes et les femmes. Comme l’explique cet article du Monde, si la température idéale pour le sexe masculin doit être comprise entre 22 et 24°, elle avoisine les 24,5 et 26° pour les femmes. N’allez pas y voir quelconque caprice : c’est scientifiquement prouvé, sous l’effet de la testostérone, les hommes sont moins sensibles au froid.

Le hic, c’est que la température idéale des bureaux est fixée arbitrairement entre 20 et 21°, soit une valeur plus proche de ce que plébiscitent les hommes. “La notion actuelle de confort thermique est centrée sur les hommes, mais c’est un problème plus général dans la science, souligne Dimitra Gkika, maîtresse de conférences en physiologie à l’université de Lille. Dans beaucoup d’études, par exemple pour développer des médicaments, les tests sont basés sur l’organisme masculin. Mais depuis quelques années, la communauté scientifique semble avoir pris conscience de ce problème”.

Dans l’hexagone, avec les nouvelles recommandations pour abaisser la consommation d’énergie (bureaux chauffés à 19° en hiver), les femmes sont encore plus sujettes à grelotter, même si on peut imaginer qu’en été, avec le coût de l’électricité, celles-ci soient un peu plus gagnantes. “En réalité, la course à la température idéale est perdue d’avance tant elle dépend de facteurs différents : sexe, âge, poids, région, saison…, pointe Nicolas Cochard, Directeur R&D du groupe Kardham, acteur de l’immobilier d’entreprise.

Un sujet plus brûlant qu’il n’y paraît

En soit, le sujet du confort thermique peut vous sembler anecdotique. Que nenni. En effet, des études ont démontré que l’inconfort thermique a une incidence sur la performance des individus. “Par exemple, une étude menée au sein d’un centre d’appels a démontré que le niveau d’erreur était plus important quand la température était trop froide”, affirme Nicolas Cochard.

De plus, le niveau d’insatisfaction ressenti serait proportionnel à l’incapacité de pouvoir contrôler la température. “Les femmes éprouvent donc davantage un sentiment d'insatisfaction puisque les températures au bureau sont plus éloignées de leurs propres normes idéales. Au global, cela impacte la performance des organisations”, poursuit notre interlocuteur.

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Au Canada, la spécialiste de la psychologie de l’environnement de travail Jacqueline C. Vischer a établi une pyramide en trois niveaux pour décrire les strates de confort d’un occupant de bureau. Il y a à la fois le confort physique, fonctionnel et psychologique.

Le problème, c’est que lorsque le confort physique n’est pas assuré, les deux autres strates ne le sont pas non plus, ce qui, dans le cas des femmes, peut s’avérer problématique. “Il y a à la fois la notion de performance réelle qui est impactée, mais aussi de performance perçue”, souligne Nicolas Cochard.

Des salariées refroidies à l’idée d’aller au bureau ?

Ce sentiment de moindre performance en se rendant au bureau doit particulièrement préoccuper les entreprises à l’heure où elles tentent de faire revenir les salariés au bureau. “À la maison, les salariées peuvent se mettre un plaid sur les genoux ou tout simplement augmenter la température de leur bureau à leur guise quand elles ont froid. De ce fait, le télétravail vient encore plus en concurrence avec le présentiel, pointe l’expert. C’est ce que la psychosociologue canadienne appelle le stress environnemental, qui touche donc davantage les femmes. Un stress environnemental qui produit aussi des inégalités parmi les travailleurs, entre ceux qui jouissent de bâtiments bien isolés par exemple, et ceux qui travaillent dans des locaux vétustes.

Alors, que faire ? Face aux températures trop froides, relâcher le dress code des femmes pour qu’elles puissent s’armer de doudounes sans manches ou d’un plaid sans jugement ? Ou encore booster le flex office pour que chacun ne choisisse non pas son ambiance, mais plutôt sa température ? Enfin, les bâtiments dernier cri permettent a minima de réguler la température d’une salle de réunion, même si cela n’est pas vraiment possible dans un espace partagé (il y a de plus en plus de consoles centrales pour éviter la déperdition d’énergie).

Dernière solution : tenter de s’approcher de la température idéale, tous sexes confondus. En 1972, trois chercheurs scandinaves ont tenté de trouver cette température idéale en menant une étude dans deux classes de lycées. Leur résultat ? “ Pour une population mixte, ce point se situe dans les données actuelles à 24,3 °C, température à laquelle 16 % des filles avaient trop froid et 16 % des garçons avaient trop chaud”, concluait l’expérience. Mais tout cela n’est pas très proche des recommandations en matière de sobriété énergétique… De l’avis de Nicolas Cochard, il n’existe pas vraiment de solution miracle. On vous l’avait dit, le sujet est chaud bouillant !

Paulina Jonquères d’Oriola

Journaliste

Journaliste et experte Future of work (ça claque non ?), je mitonne des articles pour la crème de la crème des médias […]

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